La Charte, un exemple réussi de collaboration internationale
La Charte Internationale Espace et Catastrophes Majeures est un système de réponse à l’urgence qui peut être déclenché suite à des catastrophes naturelles ou technologiques de grande ampleur. C’est un accord de collaboration internationale entre 17 agences spatiales qui œuvrent pour fournir gratuitement des images satellite aux acteurs et décideurs de la gestion de crise. Grâce à une réponse rapide et efficace, ces informations spatiales permettent de faciliter les secours, de repérer les évènements très tôt, de déterminer leur ampleur et de réduire globalement les dommages.
Un rôle opérationnel essentiel au sein de la Charte : Le « Emergency on-Call Officer » (ECO)
La Charte doit être activable 24H/24 et 7 jours/7 partout dans le monde. Pour assurer cette disponibilité, 9 agences membres de la charte se relaient en mode astreinte sur une base de rotation hebdomadaire. Les opérateurs assurant ces astreintes sont appelés ECOs (Emergency on-Call Officers) ou agents d’urgence d’astreinte. Ils sont les éléments clés de la boucle opérationnelle car ils ont en charge la coordination et la planification de la programmation des satellites les mieux adaptés à chaque type de catastrophes (satellites optiques ou radar). De la réactivité et de la pertinence de leur demande de programmation dépendra la bonne marche et l’aide apportée par la Charte.
Comme chaque minute compte, la boucle opérationnelle de la Charte est bien rodée et orchestrée selon les caractéristiques de chaque activation : type de catastrophes, localisation du désastre, conditions météorologiques, informations demandées (cartes des dégâts, état des infrastructures, etc.).
Coté CNES, le rôle d’ECO est assuré par deux personnes du service DTN/MSO/POM. Ils gèrent des semaines d’astreintes Charte toutes les 9 semaines et endossent ce rôle en plus de leur mission d’opération principale.
Pour maintenir un fonctionnement optimal, des exercices d’entrainement réguliers
Depuis sa création il y a près de 25 ans, la Charte a amélioré sans cesse ses mécanismes d’activation, son fonctionnement et ses outils. À mesure que la Charte grandit, le nombre d’agences participant aux tours d’astreinte, le nombre de satellites (270 à ce jour) et de personnes impliquées augmentent (plusieurs centaines de nationalité différente). Le système d’urgence devient alors plus complexe à opérer. Compte tenu de la nature urgente des activités de la Charte, il est essentiel que les ECO expérimentés et les nouveaux agents aient l’occasion d’exercer et de partager leurs connaissances sur les procédures, les nouveaux capteurs et les évolutions de l’environnement informatique.
Ainsi, depuis plusieurs années, la Charte a mis en place un exercice appelé SARE (Semi-Annual Refresher Exercise). Il s’agit d’un exercice de répétition semestriel visant à fournir aux ECOs une opportunité de se former, de se mettre à jour et d’accueillir les nouveaux opérateurs dans un contexte d’essai, sans enjeu d’urgence et ainsi plus calme que d’ordinaire.
L’exercice SARE va créer une situation de catastrophe hypothétique dans laquelle diverses tâches de la Charte seront exercées. La simulation sera aussi proche que possible d’une véritable activation de la Charte, à laquelle on ajoutera quelques pièges visant à stimuler la vigilance et renforcer l’esprit critique.
Les exercices ne testent pas chacun des éléments acteurs de la chaine opérationnelle de la Charte mais les éléments essentiels (procédures, réactivité, canaux de communication, etc.). De plus, ils sont réellement des processus de formation et non de test car la programmation «optimale » fournie par chaque participant n’est ni corrigée, ni évaluée.
Par-delà la formation, l’objectif des exercices est de réviser les tâches fonctionnelles et les exigences de performance, découvrir les nouveaux satellites, tester les canaux de communication de la Charte et promouvoir le partage des connaissances entre les ECOs des différentes agences.
Le CNES en charge de l’exercice SARE de Septembre 2024
Entre Septembre et Novembre 2024, le CNES est en charge de l’organisation opérationnelle de l’exercice SARE#29. Le scénario simulé est un feu de forêt ayant été inspiré par les terribles incendies qui ont ravagé les Landes à l’été 2022 en brûlant plus de 60 000 hectares. A cette époque, la Charte n’avait pas été activée mais le dispositif Copernicus Emergency Management Service avait soutenu la catastrophe.
Après avoir conçu et glissé quelques pièges dans le scénario de l’exercice (dates de catastrophe/déclenchement non cohérentes, zone d’intérêt tracées sur les océans, pas de priorités sur les zones demandées, etc.), le CNES active ensuite la Charte sur une plateforme de test dédiée (afin de ne pas perturber les opérations nominales d’urgence). Puis, en tant qu’utilisateur fictif ayant déclenché la Charte, le CNES reste disponible durant une semaine pour répondre aux sollicitations des ECOs qui auraient besoin de détails sur la catastrophe. Environ 25 personnes ont participé à cette session d’exercice. Un rapport bilan sera édité prenant en compte les retours et une séance de restitution et échanges sera organisée fin Novembre 2024 pour proposer, si besoin, quelques axes d’amélioration.
Zones d’intérêt simulées pour les besoins de l’exercice SARE de Septembre 2024.
Des entrainements pour mieux répondre à un nombre de catastrophes grandissant
Alors qu’en moyenne, la Charte était déclenchée environ 40 fois par an, on observe depuis 5 ans une augmentation importante du nombre d’activations. Rien qu’entre janvier et septembre 2024, on dénombrait 63 déclenchements, soit déjà autant que pour l’année 2023 toute entière. Les inondations et les tempêtes sont les catastrophes les plus nombreuses sur tous les continents et leur sévérité est également accrue.
Le CNES aura la présidence de la Charte d’octobre 2025 à avril 2026, au moment où l’on célèbrera les 25 années d’existence de la Charte.